Pour le sauver, les sociaux-démocrates, au pouvoir entre 1994 et 2006, ont travaillé main dans la main avec les leaders d’opposition pour changer radicalement les règles du jeu budgétaire. Auparavant, chaque ministère présentait son budget tous les ans, le Premier ministre additionnait le tout, et le Parlement validait les totaux. Désormais, les députés fixent d’abord une enveloppe générale, en se basant uniquement sur l’état des rentrées fiscales.
Puis ils déterminent, pour les trois années à venir, les plafonds de dépenses que chaque administration devra respecter à la lettre (ou plus exactement au chiffre). Si, par exemple, le ministère de l’Enseignement supérieur est contraint d’accorder plus de bourses que prévu, il devra se débrouiller pour économiser ailleurs, sur les frais informatiques, les salaires ou les primes… Peu importe, tant que le plafond n’est pas dépassé. Et la règle vaut aussi pour les régions et les communes. «Cela a pris un peu de temps, mais tout le monde s’est fait à cette discipline», assure Per Molander.
Autre principe intangible : le gouvernement doit impérativement dégager un excédent d’au moins 1% sur un cycle économique (cinq ans en moyenne). Les déficits sont autorisés les mauvaises années, lorsque les rentrées fiscales baissent.
Autre principe intangible : le gouvernement doit impérativement dégager un excédent d’au moins 1% sur un cycle économique (cinq ans en moyenne). Les déficits sont autorisés les mauvaises années, lorsque les rentrées fiscales baissent.
Mais, les bonnes, toutes les recettes supplémentaires sont automatiquement mises de côté. «Ces règles nous paraissent bien plus intelligentes que celles de Maastricht, et plus encore que celles des Allemands : ils ont interdit les déficits dans leur Constitution», commente Håkan A. Bentgsson, du centre de réflexion Arena.
La conversion aux méthodes des entreprises est encore plus spectaculaire dans l’Education. Pour conserver la gratuité de l’école (de la maternelle au bac) tout en introduisant une véritable concurrence entre les établissements, les Suédois ont inventé une formule inédite. Aujourd’hui, n’importe quelle entreprise ou association peut ouvrir une école. Les proviseurs peuvent y embaucher, licencier et fixer les salaires à leur guise. Les parents, de leur côté, choisissent le collège ou le lycée qui leur semble le meilleur. Liberté pour tout le monde en somme.
Pour chaque élève inscrit dans leurs rangs, les établissements reçoivent un «chèque éducation» de 5 000 à 8 000 euros par an versé par la commune d’origine des parents. «Afin de les attirer, nous avons dû nous battre pour améliorer le contenu de nos cours et embaucher les meilleurs profs», explique Louise Andersson, au conseil du lycée privé de VRG Jarlaplan, à Stockholm. Cette concurrence bien pensée a tiré la qualité de l’enseignement et les salaires vers le haut : 2 300 euros par mois pour un prof junior, contre 1 600 chez nous.
Là-bas, ils veulent tous prendre leur retraite le plus tard possible !
Sarkozy ferait bien d’en prendre de la graine : en 2000, les sociaux-démocrates, la droite et les syndicats suédois se sont tous mis d’accord pour réformer le système de retraites. Jusque-là, il fonctionnait à peu près comme le nôtre : quarante ans de cotisations et des pensions calculées selon le salaire moyen des quinze meilleures années. Aujourd’hui, les Suédois partent quand ils veulent. Le montant de la retraite est fixé en fonction du montant des cotisations versées, du nombre d’années travaillées, de l’espérance de vie de leur génération et, pour 2,5%, des performances du fonds de pension où les salariés placent une partie de leurs cotisations. «C’est une retraite totalement à la carte», résume l’économiste Nils Karlson. Les Suédois, qui n’aiment guère se tourner les pouces, en profitent pour s’arrêter le plus tard possible, à 66 ou 67 ans.