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jeudi 13 novembre 2014

David Ricardo : Avantages comparatifs

Né à Londres, dans une famille juive d’origine portugaise, David Ricardo est un autodidacte qui n’avait pas un profil d’universitaire comme Adam Smith ou ses amis Malthus et Say. Il est pourtant l’un des premiers à appliquer avec rigueur la méthode hypothético-déductive qui s’imposera au XXe siècle en économie.
La première intervention de Ricardo dans le débat public a lieu en 1809. Il impute alors les graves difficultés financières que connaît l’Angleterre à une émission excessive de billets par la Banque d’Angleterre (Banque centrale) et « au dangereux pouvoir qui lui a été dévolu de diminuer » (Ecrits monétaires). Le deuxième combat qu’il entreprend, cette fois au nom des capitalistes contre les propriétaires fonciers, concerne les lois sur les blés où il prône le libre-échange, lequel triomphera après sa mort.
Sa pensée
Ce fut incontestablement le premier grand théoricien de l’économie. Alors que ses prédécesseurs étaient d’abord des pragmatiques qui essayaient d’analyser rationnellement les comportements qu’ils constataient, Ricardo a fondé sa pensée d’emblée sur des systèmes et des modèles explicatifs. De son oeuvre relativement limitée (ses Principes sont particulièrement minces au regard de La richesse des nations), la postérité a retenu trois points essentiels. Le premier est l’analyse de la valeur travail, dont Marx fera ensuite son miel : seul le travail est productif, donc toute valeur marchande est issue du travail, qu’il soit direct ou indirect (équipement, énergie, biens de production).
Le second est son analyse de la rente foncière : lorsque la production agricole doit augmenter et que de nouvelles terres sont travaillées, les rendements de ces dernières sont en général moindres que ceux tirés des terres déjà mises en valeur, qui étaient cultivées parce qu’elles rendaient plus. Il faut donc davantage de travail pour produire, ce qui renchérit le coût de la production agricole. Mais comme le prix d’un même bien – le blé par exemple – est unique, les propriétaires des hectares aux rendements les plus élevés encaissent un surplus de revenu qui les enrichit, alors que ceux qui doivent acheter plus cher sont appauvris. Quand la population augmente, ce sont les propriétaires du sol qui en tirent profit, via la rente différentielle qui capte en leur faveur l’essentiel de la valeur supplémentaire produite par les superficies mises en culture.
Enfin, le troisième apport de Ricardo est son analyse du commerce international et la fameuse loi des coûts comparatifs, qui demeure, aujourd’hui encore, au fondement des analyses orthodoxes des relations commerciales internationales : le libre-échange pousse chaque pays à se spécialiser dans les domaines pour lesquels il est comparativement le mieux placé, si bien que même le pays le moins bien placé dispose de domaines d’activité possibles, qui sont ceux dans lesquels les autres sont « relativement » moins performants. Par exemple, si un pays est plus efficace à la fois dans la production de blé et dans celle de moutons, il n’a pas intérêt à poursuivre ces deux lièvres à la fois, mais à concentrer ses efforts sur la production où sa supériorité est la plus forte, laissant au concurrent moins performant le soin de se spécialiser dans l’autre. Einstein, même s’il avait été nettement meilleur cuisinier que sa femme de ménage avait intérêt à laisser la cuisine à cette dernière pour se consacrer entièrement à approfondir la question de la relativité… On comprend que Ricardo ait été l’apôtre du libre-échange.
Ses écrits
The Works and Correspondance of David Ricardo, édité par Piero Sraffa, éd. Cambridge University Press, 11 vol.
Des principes de l’économie politique et de l’impôt (1817), coll. Garnier-Flammarion, éd. Flammarion, 1992.
Pour aller plus loin
« Ricardo et la loi des coûts comparatifs », Alternatives Economiques n° 125, mars 1995.
« David Ricardo, à l’assaut du protectionnisme », Alternatives Economiques n° 209, décembre 2002.