Un trader ne meurt jamais (hélas)
Croyiez-vous que les banksters aient compris la leçon de “la crise” qu’ils ont provoquée ?
Pensiez-vous sérieusement qu’après le G20, le capitalisme allait être régulé, les paradis fiscaux fermés, et la sérénité enfin régner sur terre ?
Oui ?
Vous ne seriez pas un peu con, par hasard ? Ou simplement un tantinet naïf ?
Bien sûr les événements récents ont dû vous faire comprendre que ces mecs-là sont incurables, qu’aucune pudeur ne les entrave, et que non seulement l’obscénité de leur comportement ne leur pose pas le moindre souci, mais qu’au contraire ils la revendiquent.
Le fait que les traders de Natixis, qui ont ruiné les petites économies de millions de clients des Caisses d’Épargne et des Banques Populaires, s’octroient encore un bonus est tellement sidérant que ça ne nécessite même pas de commentaire !
[Au passage, vous connaissez la différence entre un petit vieux et un trader qui achètent des actions Natixis ?
Le petit vieux prend 1000 euros sur son livret A et achète des actions Natixis à 19.55 euros fin 2006. Deux ans plus tard, l’action ne vaut plus que 0.76 euro, il a tout perdu et revend, la mort dans l’âme. C’est alors que le trader en achète pour 1 million d’euros, et fait la culbute une semaine plus tard quand elles sont remontées à 1.46. Trader, c’est un métier. Inutile et nuisible, certes, mais c’est un métier…]
Le petit vieux prend 1000 euros sur son livret A et achète des actions Natixis à 19.55 euros fin 2006. Deux ans plus tard, l’action ne vaut plus que 0.76 euro, il a tout perdu et revend, la mort dans l’âme. C’est alors que le trader en achète pour 1 million d’euros, et fait la culbute une semaine plus tard quand elles sont remontées à 1.46. Trader, c’est un métier. Inutile et nuisible, certes, mais c’est un métier…]
Ces bonus, ces stock-options alors même qu’ils licencient et empochent des aides publiques à coups de milliards sont effectivement très spectaculaires et compréhensibles même par le dernier des abrutis. Dans mon billet de mardi dernier, je soulignais combien cette notion d‘“entreprise aidée” était un “cache-sexe”, puisque toutes les entreprises sont aidées par l’État ! Mais je suis très heureux d’avoir lu la même constatation chez Malakine, blogueur talentueux, même pas classé parmi les gauchistes, et qui parle quant à lui de “mystification”.
Toutes les entreprises sont « aidées » !
Enfin quel est ce concept curieux « d’entreprise aidée » ?? Toutes les entreprises sont aidées d’une manière ou d’une autre, directement par les exonérations de charges sur les bas salaires, les crédits d’impôts divers et variés, ou indirectement par les conditions favorables que la collectivité crée pour son développement : la formation de ses salariés, les infrastructures, les services publics dont elle peut bénéficier… Une entreprise n’est pas une abstraction qui vivrait hors sol dans une concurrence mondiale éthérée. C’est un système productif en interaction étroite avec son environnement socio-économique.
Une mystification !
Fondamentalement, ce qui est choquant, ce n’est pas que les bonus soient financés par des fonds publics. Les sur-rémunérations sont de toute manière prélevées sur des victimes innocentes, salariés ou clients. Elles sont choquantes en elles-mêmes, parce qu’elles s’assimilent à du vol ou de la prédation, parce qu’elles sont totalement déconnectées de l’activité de l’entreprise, parce qu’elles s’assimilent d’avantage à une rente de situation qu’à une rémunération d’un travail.
La minable entourloupe de Sarkozy, ce décret plus ou moins bidon qui devrait interdire les bonus et stock-options dans les entreprises qui bénéficient d’aides publiques, n’est qu’une concession marginale qui a trois objectifs : premièrement amortir la colère populaire ; deuxièmement donner à Sarkozy une image totalement surréaliste de défenseur des pauvres contre les riches ; et troisièmement permettre que la fête continue ! Ce qui aurait assurément été plus difficile avec une vraie mesure, comme l’instauration d’un revenu maximum…
Mais en fait, tout ça n’est qu’anecdote. Il y a pire : croyez-moi ou non, mais mon but dans ce billet est de vous convaincre, oui, même vous qui êtes un indécrottable spectateur passif des JT de TF1 : ce qui est le plus grave, c’est que les financiers n’ont pas changé. Ils ne changeront jamais. Pire, ils sont en manque. En manque de boursicotage, en manque de spéculation. En manque de toutes les conneries qui constituent leurs petites vies de parasites, et qui ont conduit le monde à la ruine dont nous voyons tous les jours les conséquences sur des victimes innocentes.
J’ai regardé d’un œil distrait jeudi soir l’émission avec DSK qui répondait aux questions de Mâme Chabot. DSK, qui du ton professoral qui le caractérise, nous expliquait la “crise”, ses tenants, ses aboutissants, ses solutions. Ce mec a un talent certain pour avoir l’air compétent. On se demande même comment avec une sommité pareille sur terre la “crise” a bien pu se produire….
Mais ne vous y trompez pas, il ne comprend rien, comme tous les autres. Il subit, et sa seule solution est de répéter le mot “croissance” comme un gamin égaré dans la foule et qui répète “maman !”. Il est incapable de comprendre que c’est cette recherche éperdue de la “croissance” à tous les niveaux qui nous a foutus dans la merde, et que la considérer comme le noeud d’une quelconque solution est parfaitement risible.
Au cours de cette émission, Mâme Chabot avait invité quelques autres faire-valoir, parmi lesquels un financier : Marc Fiorentino. On se sait pas trop s’il est banquier, trader, écrivain (il a notamment écrit un best seller, “un trader ne meurt jamais”, qui a inspiré le titre de ce billet), journaliste, ou tout ça à la fois, mais une chose est sûre : sa passion dans la vie, c’est le pognon. Il en gagne probablement beaucoup (il me semble avoir vu quelque part qu’il a une fortune personnelle de 25 millions d’euros…) , et méprise ceux qui ne sont pas dans son cas, sans même se poser la question de savoir pourquoi le boulanger ou la femme de ménage, qui font de vrais métiers utiles, gagnent infiniment moins que lui qui non seulement ne sert à rien, mais est parfaitement nuisible pour le bon fonctionnement de la société. Inutile de préciser qu’il est un Sarkophile convaincu, vous l’aviez forcément compris !
En regardant qui était cet individu qui venait de répondre à Benoît Hamon (qui n’est pourtant pas le pire gauchiste qui soit, mais qui venait d’évoquer, horreur, le plafonnement des revenus) avec un rictus de mépris d’une violence que je n’avais plus guère observée depuis une interview de Besancenot par Christine Ockrent, j’ai découvert que nous étions en quelque sorte confrères, puisqu’il tient un blog.
Bon, la ressemblance s’arrête là, puisque le contenu de ses billets se limite généralement à des commentaires vibrants d’incompétence ® au sujet des cours de bourse (du style : “tiens, ça monte”, ou “ah, ça descend”).
Mais on tombe parfois sur des pépites. Je vous recommande celle-ci , dont le titre est “le jackpot” , et dans laquelle, après avoir énuméré les milliards gagnés par quelques traders (et en omettant de préciser que ces milliards ont été volés aux salariés ordinaires, ceux qui ont un “vrai” travail), conclut ainsi (veuillez vous munir d’une pince à linge, et au besoin d’un seau à vomi, on n’est jamais trop prudent…) :
Mais on tombe parfois sur des pépites. Je vous recommande celle-ci , dont le titre est “le jackpot” , et dans laquelle, après avoir énuméré les milliards gagnés par quelques traders (et en omettant de préciser que ces milliards ont été volés aux salariés ordinaires, ceux qui ont un “vrai” travail), conclut ainsi (veuillez vous munir d’une pince à linge, et au besoin d’un seau à vomi, on n’est jamais trop prudent…) :
“Et l’avenir s’annonce radieux…. La spéculation ne s’arrêtera jamais. Les hedge funds continueront à prospérer. Ils déménageront de paradis fiscaux trop voyants vers des paradis fiscaux plus discrets comme l’Angleterre. La fête continue!”
Sic. Je vous avais prévenu, c’est du lourd.
Allez, poursuivons avec une brillante analyse, qui illustre le “manque” chez les spéculateurs qui ne peuvent plus spéculer comme ils veulent (c’est-à-dire “comme avant”), notamment en raison de l’embarras que leur procure l’aide des États (qui au passage les a sauvés, mais c’est sûrement un “détail”, comme dirait Le Pen), aide dont ils aimeraient maintenant se débarrasser.
“Et beaucoup aimeraient voler à nouveau de leurs propres ailes
Goldman Sachs a annoncé hier qu’elle allait rembourser avant la fin avril les 10 milliards d’euros prêtés par l’État. D’autres mastodontes comme Wells Fargo ou encore Bank of America ont annoncé qu’elles vont tout faire pour rembourser le plus vite possible. Et pour cause. Depuis le début de l’année, les banques libres de spéculer engrangent des profits sans précédent ou presque. Jamais les opportunités de trading et d’arbitrage n’ont été aussi massives puisque la plupart des banques sont soit (ndlr : sic !) au tapis soit (ndlr : resic ! si yen a ksa les démange ke jkoz pa bien la France, kil se dise que mon tant chpréfère le passer a des trucs kim rapporte des sous! ) prises dans les filets des aides gouvernementales qui leur imposent des règles de plus en plus strictes.
Goldman Sachs a annoncé hier qu’elle allait rembourser avant la fin avril les 10 milliards d’euros prêtés par l’État. D’autres mastodontes comme Wells Fargo ou encore Bank of America ont annoncé qu’elles vont tout faire pour rembourser le plus vite possible. Et pour cause. Depuis le début de l’année, les banques libres de spéculer engrangent des profits sans précédent ou presque. Jamais les opportunités de trading et d’arbitrage n’ont été aussi massives puisque la plupart des banques sont soit (ndlr : sic !) au tapis soit (ndlr : resic ! si yen a ksa les démange ke jkoz pa bien la France, kil se dise que mon tant chpréfère le passer a des trucs kim rapporte des sous! ) prises dans les filets des aides gouvernementales qui leur imposent des règles de plus en plus strictes.
Elles veulent être également libres de rémunérer leurs équipes et leurs dirigeants
Et c’est probablement la raison principale de cette ruée vers le remboursement. Les banques indépendantes de l’État vont pouvoir attirer les meilleurs éléments qui quittent quotidiennement les banques où les bonus vont être interdits de fait. Le monde de la finance va renaître de ses cendres. Avec d’un côté un secteur semi-nationalisé et de l’autre un secteur privé qui a déjà replongé dans les délices de la spéculation et des bonus….”
Et c’est probablement la raison principale de cette ruée vers le remboursement. Les banques indépendantes de l’État vont pouvoir attirer les meilleurs éléments qui quittent quotidiennement les banques où les bonus vont être interdits de fait. Le monde de la finance va renaître de ses cendres. Avec d’un côté un secteur semi-nationalisé et de l’autre un secteur privé qui a déjà replongé dans les délices de la spéculation et des bonus….”
Vous le voyez, je n’invente rien ! Et ces déclarations ne sont hélas pas seulement les élucubrations du cerveau ravagé d’un spéculateur frustré, mais reflètent l’opinion de la profession, et corroborent en tout cas totalement ce que je lis et entends ici ou là de la part d’acteurs plus anonymes du secteur financier.
Que faire de ces mecs-là ? Les obliger à travailler chez un agriculteur bio, pour leur donner l’occasion d’être au moins utiles à quelque chose une fois dans leur vie ? Peine perdue, il ne faudra pas une semaine pour qu’ils aient mis en place un marché à terme sur le prix de la tomate… Incurables, je vous le dis.
Mettez-vous donc ces vérités dans la tête :
- Ils n’ont rien compris et ne comprendront jamais rien.
- Ils n’ont retenu aucune leçon.
- Ils sont prêts à tout pour s’adonner à leur addiction.
- Il n’auront aucune reconnaissance de l’effort public.
- Ils vous ont toujours méprisé et vous mépriseront toujours.
- Si cette “crise” se termine un jour, il y en aura une autre quelques années plus tard, et ils en seront encore à l’origine.
En particulier, n’accordez aucune importance aux déclarations que vous verrez début avril dans vos JT : quelques personnes bien habillées et à l’air très sérieux qui vont vous faire croire que tous les problèmes sont réglés (alors que ce sont eux qui les ont provoqués), que les paradis fiscaux vont disparaître et que la finance sera désormais ré-gu-lée.
Les financiers sont des menteurs, ils jouent et s’empiffrent avec votre argent.
Les politiciens sont sinon leurs complices, du moins sous leur contrôle. Obama comme les autres.
Autant le savoir, ça évitera des désillusions…